Présentation d’ELTIF 2.0 : ses implications pour l'investissement dans le crédit privé européen

2 min de lecture 8 avr. 24

Alors que de nombreuses PME européennes choisissent de rester dans les marchés privés plus longtemps - et, dans certains cas, de choisir de se retirer complètement de la cote- nous pensons que le crédit aux entreprises privées européennes joue un rôle fondamental dans l’accompagnement financier de leur croissance, en particulier dans le contexte d'une réduction continue du crédit bancaire. L’introduction d’un cadre réglementé, tels que les ELTIF, signifie qu’une base d’investisseurs plus large peut désormais accéder à un stade précoce à des actifs alternatifs tels que le crédit privé. Le marché européen du crédit privé offre aux investisseurs la possibilité de profiter de rendements potentiellement plus élevés que ceux du marché américain, ainsi que de certaines caractéristiques défensives qui peuvent aider à surmonter les périodes de volatilité du marché, selon nous.

La grande majorité des entreprises de l'Union européenne sont des petites et moyennes entreprises1. Soutenir ces entreprises est selon nous la clé d'une croissance économique durable et à long terme. Cela est d'autant plus vrai que les entreprises ont tendance à rester plus longtemps entre les mains du secteur privé 2.

Dans la mesure où le crédit bancaire en Europe continue de se faire plus rare sous l’effet d'exigences réglementaires de plus en plus strictes3, nous pensons que l'écosystème des entreprises est prêt à accueillir les prêteurs privés qui peuvent stimuler le moteur économique européen. Selon nous, la dette privée peut jouer un rôle fondamental dans le financement des PME européennes tout au long de leur cycle de croissance, mais comment les investisseurs peuvent-ils accéder à ce paysage prometteur ?

Afin de contribuer à combler le déficit de financement public des entreprises non cotées et d'encourager l'investissement dans l'économie réelle, le Fonds Européen d'Investissement à Long Terme (ELTIF) a été créé en 2015. L'objectif était d’orienter les capitaux vers des secteurs clés tels que les entreprises, les infrastructures, l'immobilier et les investissements durables, tout en favorisant la démocratisation des actifs privés pour les investisseurs particuliers4.

Surmonter les barrières à l’entrée

Dans le passé, il était quasiment impossible pour de nombreux investisseurs privés européens d'accéder aux investissements non cotés à long terme de type ELTIF. Les marchés privés - où l'innovation est plus susceptible d'être le fait de petites entreprises proposant des technologies ou des idées nouvelles - ont toujours été dominés par des investisseurs institutionnels tels que des fonds de pension, des fondations et des fonds souverains.

« En investissant dans le crédit privé via les ELTIF, un plus grand nombre d'investisseurs peuvent potentiellement bénéficier d'une source de diversification, de performances attractives ajustées du risque et d'une exposition aux besoins de financement de l'économie réelle. »

L'illiquidité inhérente à de nombreux segments des classes d’actifs privés a généralement constitué une barrière à l'entrée, en ce sens où les structures de fonds fermés et illiquides ne répondent pas toujours aux exigences réglementaires ou de portefeuille pour certains profils d'investisseurs. Les gérants d’actif exigent souvent des engagements de capital minimum élevés pour les actifs de crédit privé illiquides, ce qui peut également avoir un impact sur la diversification des portefeuilles pour les plus petits. 

La création de cadres réglementés tels que ELTIF 2.0 favorise l’élaboration d'un plus grand nombre de véhicules semi-liquides qui peuvent investir dans l'ensemble de l’univers des marchés privés. Cette évolution continue de l'univers des actifs alternatifs a ouvert la possibilité à une base d'investisseurs plus large d’avoir ainsi un accès précoce aux opportunités potentielles que celui-ci abrite.

Un cadre ELTIF amélioré et adaptable

Le premier cadre ELTIF 1.0 contenait des restrictions et des définitions strictes sur le type d'investissements que les ELTIF pouvaient réaliser. Ces contraintes visaient à garantir une diversification adéquate pour les investisseurs. Elles ont toutefois été jugées trop strictes, en limitant le potentiel de croissance, d’où un engouement initial plus tempéré. Mais, certaines d'entre elles ont été révisées et assouplies, ce qui a permis d'élargir l'éventail des stratégies d'investissement et d'accroître la participation des investisseurs.

« Les principaux avantages du cadre restent inchangés : un accès réglementé aux actifs privés pour une base d'investisseurs plus large et un passeport de commercialisation qui permet un accès efficace dans toute l’UE, favorisant à la fois la diversification des investisseurs et l'efficience des coûts de portefeuille », déclare Aramide Ogunlana, Private Credit Director chez M&G Investments.

Grâce au cadre ELTIF, qui a été révisé avec l'introduction d'ELTIF 2.0 en janvier, les investisseurs non institutionnels peuvent s'exposer à ces opportunités d'investissement à long terme, généralement illiquides, qui sont selon nous susceptibles d'offrir des performances supérieures avec le temps. L'une des principales améliorations apportées a été l'abaissement du seuil d'investissement minimum de 10 000 € à 0 €, mais les clients et les sociétés de gestion d’actifs se doivent de mettre en balance l'accès et l'appétit avec la capacité de déploiement sur leurs marchés respectifs. Le cadre révisé permet également au gestionnaire de co-investir avec ses clients et nous pensons que l'alignement est un outil clé pour protéger les intérêts des investisseurs, en particulier pour les investissements à long terme illiquides.

« Suite à la modification réduisant l'investissement minimum dans les actifs éligibles de 70 % à 55 %, des actifs cotés peuvent désormais représenter jusqu'à 45 % d'un portefeuille ELTIF », explique Aramide Ogunlana. « Si nous nous réjouissons de l'élargissement de la définition, l'abaissement de l'allocation minimale aux actifs éligibles implique que les investisseurs doivent examiner très attentivement quel fonds leur permettra de tirer le meilleur parti de la diversification par les actifs privés".

Un autre changement consiste en une définition moins restrictive de ce qui constitue un « actif réel ». Dans le cadre initial, les actifs réels étaient définis comme ayant une valeur d'au moins 10 millions €. Mais, ELTIF 2.0 définit les actifs éligibles comme ceux ayant « une valeur intrinsèque due à leur substance et à leurs caracteristiques»5, ce qui élargit considérablement le périmètre des investissements ELTIF.

Investir dans le crédit privé grâce à ELTIF 2.0

Le cadre ELTIF 2.0 fournit une structure réglementée qui permet aux investisseurs d'accéder à des opportunités potentielles au sein du vaste univers du crédit privé. En investissant dans le crédit privé via les ELTIF, un plus grand nombre d'investisseurs peuvent potentiellement bénéficier d'une source de diversification, de performances attractives ajustées du risque et d'une exposition aux besoins de financement de l'économie réelle.

Dans le cadre remanié, une structure de fonds semi-liquide avec une approche multi-crédit peut offrir un accès au large éventail d'options au sein de l'univers de la dette privée - depuis les prêts aux entreprises privées jusqu’aux prêts destinés au financement d'actifs réels. Les risques sous-jacents et les moteurs de performance sont très différents, ce qui permet une exposition flexible à des types alternatifs et différenciés d'actifs générateurs de revenus tout au long du cycle. Ces derniers peuvent ainsi offrir des avantages potentiels en termes de profil risque/rendement par rapport à une allocation d'actifs traditionnelle, et ce, afin d'aider à surmonter toute éventuelle volatilité.

Au-delà de l'illiquidité, il est important de noter que les investissements dans le crédit privé comportent d'autres risques intrinsèques, tels que le risque de crédit, le risque de liquidité et le risque de marché, que les investisseurs doivent attentivement examiner avant de prendre toute décision d'investissement.

Néanmoins, les sociétés de gestion d’actifs présentes depuis longtemps sur le marché, comme M&G Investments, sont bien placées pour tirer parti de leur expertise et de leur envergure afin de naviguer dans le monde souvent complexe du crédit privé européen, ce qui leur permet de moduler les allocations afin de créer de la valeur dans différentes conditions de marché. Les entreprises modifient de manière dynamique leurs sources de financement, ce qui brouille les pistes à mesure que les segments liquides et illiquides des marchés du crédit privé convergent. Nous sommes convaincus qu'il est essentiel que les gérants d’actifs disposent des compétences adéquates pour mettre à profit cette tendance et aider les investisseurs à atteindre leurs objectifs.

Par exemple, le crédit privé liquide aux entreprises comprend les prêts syndiqués à large échelle (Broadly Syndicated Loans - BSL) qui peuvent offrir un déploiement rapide, la diversité et la liquidité du portefeuille, ainsi qu'une protection potentielle contre le risque baissier grâce à la sécurité et à la séniorité, avec une structure de taux généralement variable. Mais, certaines des meilleures opportunités en matière d'actifs privés se situent selon nous à l'extremité du segment des rendements plus élevés, du côté illiquide du marché, comme les prêts directs aux grandes et moyennes entreprises, où le risque est souvent mal évalué. La liquidité est certes moindre, mais nous pensons que l'introduction de covenants solides (largement absents des marchés cotés) peut offrir aux investisseurs une option d'équilibrage des risques tout en conservant une prime de rendement.

Pourquoi le crédit privé européen

« Il va sans dire que les États-Unis sont un marché plus vaste, mais comme il s'agit d'une juridiction largement régie par la même réglementation, la concurrence y est sévère et nous avons observé un assouplissement des normes d’octroi de crédit pour gagner des transactions », déclare Michael George, Gérant de fonds chez M&G Investments.

« Le potentiel de croissance est également plus évident en Europe », ajoute-t-il. « Les banques se sont déjà largement retirées aux États-Unis, ce qui est encore loin d’être le cas en Europe. Nous voyons également plus de risques extrêmes aux États-Unis, une plus grande exposition aux titres notés CCC, de fondamentaux plus fragiles et des performances inférieures à celles de l'Europe sur plusieurs périodes, y compris en 2023 ».

Si l'Union européenne ne dispose pas de sociétés de développement commercial (BDC), un moyen courant pour les investisseurs wholesale américains de s’exposer au crédit privé, l’introduction de régimes de fonds tels que les ELTIF aide toutefois l'Europe à combler son retard. En effet, les régulateurs ont tenu compte du fossé économique que la restriction de l’accès aux marchés privés crée à la fois pour les entreprises et les consommateurs.

Alors que la tendance des entreprises à rester dans les marchés privés plus longtemps se poursuit, l'accès au crédit privé européen permet, selon nous, non seulement de bénéficier de tous les avantages potentiels en termes de performance qui peuvent être associés à la classe d'actifs, mais donne également aux investisseurs la possibilité de jouer un rôle essentiel dans le financement de la croissance économique de l’ensemble de l'Union européenne tout en exploitant certaines des innovations qui pourraient façonner la société à l'avenir.

1 Parlement européen, « Small and medium-sized enterprises », (europarl.europa.eu), octobre 2023.
2 Nasdaq, août 2022, « As Companies Stay Private Longer, Advisors Need Access to Private Markets », août 2022.
3 Oliver Wyman, Eurostat, AFME, SIFMA.
4 RÈGLEMENT (UE) 2015/760 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL - du 29 avril 2015 - relatif aux fonds européens d'investissement à long terme (europa.eu)
5 Journal officiel de l'Union européenne, « Règlement (UE) 2023/606 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2023 », (eur-lex.europa.eu), 20 mars 2023.
 

 

Les ELTIF sont illiquides par nature car leurs investissements sont à long terme. Pour les investisseurs, il s’agit d’un investissement peu liquide. Les ELTIF peuvent ne pas convenir aux investisseurs qui ne sont pas en mesure de supporter un engagement à long terme et illiquide de cette nature. Seule une petite partie d’un portefeuille devrait être investie dans un ELTIF.

La valeur des investissements est vouée à fluctuer, pouvant conduire les prix à la baisse comme à la hausse, et les investisseurs ne sont pas assurés de récupérer le montant initial.

Nos actualités associées