Le rebond des actions « value » : un simple épisode ou le début du regain de faveur tant attendu ?

5 min de lecture 13 juin 22

On ne cesse de nous demander si le rebond actuel du style « value n’est qu’un sursaut ou le début du retour en grâce tant attendu. La réponse est bien sûr : « nous n’en savons rien ». Contrairement à nos confrères de croissance, tout véritable investisseur « value » se garde toujours de prétendre en savoir beaucoup sur l’avenir. Mais, dans la mesure où la question nous est maintes fois posée, nous avons pensé que devrions au moins essayer d’y répondre. 

Selon nous, il existe plusieurs bonnes raisons pour lesquelles le retour du style « value » a fait long feu au cours de la dernière décennie, mais la situation ne semble désormais plus être la même.

1. Inversement de la tendance en faveur de la croissance

Premièrement, les intervenants sur les marchés ont entretenu une tendance profondément ancrée et auto-alimentée en faveur des entreprises de croissance et de qualité. Et plus cela dure, plus il faut d’énergie pour faire dévier « Monsieur le Marché » de sa trajectoire.

Toutes les tentatives de retour du style « value » sur le devant de la scène se sont également révélées plutôt timides ; elles n’ont pas duré longtemps ni été particulièrement imposantes. Il a donc été relativement facile d’en faire abstraction. À vrai dire, nous avons appris au cours de la dernière décennie que tout rebond des actions « value » était une excellente occasion de doubler la mise sur celles de croissance. En effet, toute tentative d’imposer des limites de valorisation à sa sélection de valeurs s’est avérée mal inspirée.

Mais, un facteur à prendre en considération est le suivant : ce n’est pas le cas cette fois-ci dans la mesure où la rotation en faveur des actions « value » a été tout aussi violente que prolongée. Les investisseurs axés sur les valeurs de croissance accusent des pertes très importantes, en particulier ceux qui ont pris pied tardivement sur le marché. Pour autant, dans de nombreux cas, ceux qui ont investi avant la pandémie de Covid-19 ont également souffert.

2. Une extrême dispersion des valorisations

Deuxièmement, je pense qu’il est important de rappeler le point de départ de cette rotation. Cette dernière a fait suite à l’incroyable appréciation des actions de croissance/qualité qui est intervenue dans le monde post-Covid. (Pour nous, cela a beaucoup ressemblé à un sommet explosif (« blow-off top »)/une phase de capitulation, une situation qui est assez courante lorsque de longues tendances arrivent à leur terme).

La dispersion des valorisations sur le marché a alors atteint des niveaux sans précédent : sur la base de nombreuses mesures, les valeurs se situaient dans le 100ème centile depuis aussi loin que la plupart des observateurs sont parvenus à trouver les données (il s’agit donc probablement de la dispersion la plus extrême de l’histoire des marchés actions).

Moi qui ai commencé ce travail en février 1999 et ai été témoin de cette année absolument folle, je n’aurais jamais cru que les choses pourraient devenir plus dingues que cela... et pourtant, elles l’ont bel et bien été presque exactement 20 ans plus tard. L’importance de ce point est, selon nous, que le caractère extrême de la situation de départ devrait mathématiquement accroître sensiblement la probabilité d’une poursuite de cette rotation. En particulier à cause de la raison suivante...

3. Le monde change

La troisième raison de notre optimisme quant au potentiel du style « value » réside dans le fait que nous pensons que plusieurs tendances puissantes et de longue durée, qui se sont avérées défavorables aux actions « value » par le passé, sont non seulement en passe de prendre fin, mais également presque certainement en train de s’inverser (nous avons abordé ce point dans notre blog de juin 2020 « Les années 2020 - la décennie des « actifs bon marché »).

La dernière décennie a été caractérisée par une mondialisation de plus en plus prononcée, des taux d’intérêt toujours plus bas, des banques centrales prédominantes, une massive création de crédit, une impression de monnaie tout simplement inouïe et la déflation. Nous pensons que ces facteurs ont très fortement contribué à la dispersion extrême des valorisations et, osons le dire, aux dérives spéculatives.

Toutefois, il devient de plus en plus évident que le monde va s’avérer très différent au cours des dix prochaines années. Et si le monde est appelé à changer, nous pensons que des actions très différentes sont tout autant appelées à bien et mal se comporter.

Des places interchangeables

Nous pensons que ce point est très négligé dans le cadre de l’analyse du potentiel de surperformance future. D’après mon expérience, la plupart des gens considèrent les actions « value » et de croissance comme deux catégories d’actions distinctes, mais immuables. En réalité, ce n’est pas le cas.

Lorsque des régimes changent, plusieurs entreprises qui étaient jusque-là « value » deviennent les nouvelles valeurs de croissance « chouchoutées » ; il suffit de penser à ces groupes de consommation de base pour le moins peu enthousiasmants pendant le boom du secteur des TMT (technologies, médias et télécommunications) qui ont ensuite été encensés pendant l’ère de l’engouement pour les valeurs à « profil obligataire » entre le milieu et la fin des années 2010.

Et à l’inverse, plusieurs de ces valeurs de croissance deviennent quant à elle les nouvelles actions « value », à l’instar des groupes de télécommunications avant et après la bulle des TMT ou des banques avant et après la crise financière.

Selon nous, cela va se reproduire. Si nous avons raison, et que vous voyez des entreprises changer de « catégories » par rapport à ces écarts de valorisation de départ, nous pensons que la surperformance potentielle de celles dites jusque-là « value » est alors considérable.

4. L’investissement de croissance reste dominant

Notre quatrième observation concernant le potentiel des actions « value » est la suivante : les marchés sont encore très acheteurs du style « croissance » et très vendeurs du style « value ». Notre brève analyse de diverses bases de données révèle que la quasi-totalité des actifs sous gestion au sein des fonds communs ne sont pas investis dans des styles « value ». Nous n’avons pas effectué ce même travail sur les bases de données relatives aux transactions des particuliers, mais nous pensons qu’il est évident que les actions de croissance y sont plus représentées qu’elles ne le devraient à juste titre.

Et si certains clients (courageux ?) ont alloué de l’argent à nos fonds M&G Value, la réalité est que la majorité des intervenants sur les marchés ne sont pas encore disposés à remettre en cause leur conviction dans l’investissement de croissance et que nous n’avons guère observé de mouvement d’arbitrage.

Une hausse durable des actions « value »

En dépit de cette prudence, notre réponse à la question de savoir si cela pourrait être le début d’un rebond prolongé du style « value » est oui. Nous pensons fermement que la situation est différente cette fois-ci. Selon nous, le potentiel de performance des entreprises « value » est énorme. Mais, ne nous croyez pas. En effet, en tant qu’investisseurs « value », nous sommes les personnes les moins objectives au monde à qui poser cette question.

Et une dernière chose. On nous demande aussi souvent si le moment est désormais opportun pour acheter certaines actions de croissance bon marché ? Cela pourrait faire l’objet d’un autre article, mais notre réponse courte est la suivante : « absolument pas ».

La valeur et les revenus générés par l’actif du fonds fluctueront à la hausse comme à la baisse. Ainsi, la valeur de votre investissement pourra aussi bien baisser qu’augmenter. Rien ne garantit que le fonds atteindra son objectif et il est possible que vous ne récupériez pas la totalité de votre investissement initial.

Les performances passées ne préjugent pas des performances futures.

Les opinions exprimées dans le présent document ne sauraient en aucun cas constituer des recommandations, des conseils ou des prévisions.

Rédigé par Richard Halle

La valeur des investissements peut fluctuer et ainsi faire baisser ou augmenter la valeur liquidative des fonds. Vous pouvez donc ne pas récupérer votre placement d'origine.

Nos actualités associées